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n’était pas au pouvoir ; il savait bien qu’il serait toujours le maître, même avec un ministère pris dans le salon de Mme Raversi. On donnait à Grianta mille détails sur ces intrigues ; l’absence de Mosca, que tout le monde peignait comme un ministre du premier talent et un homme d’action, permettait de ne plus songer aux cheveux poudrés, symbole de tout ce qui est lent et triste ; c’était un détail sans conséquence, une des obligations de la cour, où il jouait d’ailleurs un si beau rôle. Une cour, c’est ridicule, disait la comtesse à la marquise, mais c’est amusant ; c’est un jeu qui intéresse, mais dont il faut accepter les règles. Qui s’est jamais avisé de se récrier contre le ridicule des règles du whist ? Et pourtant, une fois qu’on s’est accoutumé aux règles, il est agréable de faire l’adversaire repic et capot.

La comtesse pensait souvent à l’auteur de tant de lettres aimables ; le jour où elle les recevait était agréable pour elle ; elle prenait sa barque et allait les lire dans les beaux sites du lac, à la Pliniana, à Bélan, au bois des Sfondrata. Ces lettres semblaient la consoler un peu de l’absence de Fabrice. Elle ne pouvait du moins refuser au comte d’être fort amoureux ; un mois ne s’était pas écoulé, qu’elle songeait à lui avec une amitié tendre. De son côté le comte Mosca était presque de bonne foi quand il lui offrait de donner sa démission, de quitter le ministère, et de venir