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de tout daigne pourtant apprécier la faveur exorbitante dont elle vient d’être l’objet de la part du souverain !

Vers la fin de la soirée, le comte vint à elle :

— Il faut que je vous dise des nouvelles. Aussitôt les personnes qui se trouvaient auprès de la duchesse s’éloignèrent.

— Le prince, en rentrant au palais, continua le comte, s’est fait annoncer chez sa femme. Jugez de la surprise ! Je viens vous rendre compte, lui a-t-il dit, d’une soirée fort aimable, en vérité, que j’ai passée chez la Sanseverina. C’est elle qui m’a prié de vous faire le détail de la façon dont elle a arrangé ce vieux palais enfumé. Alors le prince, après s’être assis, s’est mis à faire la description de chacun de vos salons.

Il a passé plus de vingt-cinq minutes chez sa femme, qui pleurait de joie ; malgré son esprit, elle n’a pas pu trouver un mot pour soutenir la conversation sur le ton léger que son altesse voulait bien lui donner.

Ce prince n’était point un méchant homme, quoi qu’en pussent dire les libéraux d’Italie. À la vérité, il avait fait jeter dans les prisons un assez bon nombre d’entre eux, mais c’était par peur, et il répétait quelquefois, comme pour se consoler de certains souvenirs : Il vaut mieux tuer le diable que si le diable nous tue. Le lendemain de la soirée dont nous venons de parler, il était tout