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çaient à être fraîches, le geôlier le laissait monter seul, l’enfermait à clef dans ce clocher qui communiquait à la terrasse, et retournait se chauffer dans sa chambre. Eh bien ! un soir, Clélia ne pourrait-elle pas se trouver, escortée par sa femme de chambre, dans la chapelle de marbre noir ?

Toute la longue lettre par laquelle Fabrice répondait à celle de Clélia était calculée pour obtenir cette entrevue. Du reste, il lui faisait confidence avec une sincérité parfaite, et comme s’il se fût agi d’une autre personne, de toutes les raisons qui le décidaient à ne pas quitter la citadelle.

« Je m’exposerais chaque jour à la perspective de mille morts pour avoir le bonheur de vous parler à l’aide de nos alphabets, qui maintenant ne nous arrêtent pas un instant, et vous voulez que je fasse la duperie de m’exiler à Parme, ou peut-être à Bologne, ou même à Florence ! Vous voulez que je marche pour m’éloigner de vous ! sachez qu’un tel effort m’est impossible ; c’est en vain que je vous donnerais ma parole, je ne pourrais la tenir. »

Le résultat de cette demande de rendez-vous fut une absence de Clélia, qui ne dura pas moins de cinq jours ; pendant cinq jours elle ne vint à la volière que dans les instants où elle savait que Fabrice ne pouvait pas faire usage de la petite ouverture pratiquée à l’abat-jour. Fabrice fut au désespoir ; il conclut de cette absence que, malgré