Page:Stendhal - La chartreuse de Parme (Tome 2), 1883.djvu/195

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 191 —

peu, surtout faites répéter les questions pour réfléchir.

Les trois juges entrèrent. Trois échappés des galères, se dit Fabrice en voyant ces physionomies basses, et non pas trois juges ; ils avaient de longues robes noires. Ils saluèrent gravement, et occupèrent, sans mot dire, les trois chaises qui étaient dans la chambre.

— Monsieur Fabrice del Dongo, dit le plus âgé, nous sommes peinés de la triste mission que nous venons remplir auprès de vous. Nous sommes ici pour vous annoncer le décès de son excellence M. le marquis del Dongo, votre père, second grand majordome major du royaume lombardo-vénitien, chevalier grand-croix des ordres de, etc., etc., etc. Fabrice fondit en larmes ; le juge continua.

— Madame la marquise del Dongo, votre mère, vous fait part de cette nouvelle par une lettre missive ; mais comme elle a joint au fait des réflexions inconvenantes, par un arrêt d’hier, la Cour de justice a décidé que sa lettre vous serait communiquée seulement par extrait, et c’est cet extrait que monsieur le greffier Bona va vous lire.

Cette lecture terminée, le juge s’approcha de Fabrice toujours couché, et lui fit suivre sur la lettre de sa mère les passages dont on venait de lire les copies. Fabrice vit dans la lettre les mots emprisonnement injuste, punition cruelle pour un crime qui n’en est pas un, et comprit ce qui avait