Aller au contenu

Page:Stendhal - La chartreuse de Parme (Tome 2), 1883.djvu/29

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 25 —

Le prince signa et data de la veille ; puis, rendant la sentence à Rassi, il lui dit : Écrivez immédiatement au-dessous de ma signature : « La duchesse Sanseverina s’étant derechef jetée aux genoux de son altesse, le prince a permis que tous les jeudis le coupable ait une heure de promenade sur la plate-forme de la tour carrée vulgairement appelée tour Farnèse. »

— Signez cela, dit le prince, et surtout bouche close, quoi que vous puissiez entendre annoncer par la ville. Vous direz au conseiller De’Capitani, qui a voté pour deux ans de forteresse et qui a même péroré en faveur de cette opinion ridicule, que je l’engage à relire les lois et règlements. Derechef, silence, et bonsoir. Le fiscal Rassi fit avec beaucoup de lenteur trois profondes révérences que le prince ne regarda pas.

Ceci se passait à sept heures du matin. Quelques heures plus tard, la nouvelle de l’exil de la marquise Raversi se répandait dans la ville et dans les cafés, tout le monde parlait à la fois de ce grand événement. L’exil de la marquise chassa pour quelque temps de Parme cet implacable ennemi des petites villes et des petites cours, l’ennui. Le général Fabio Conti, qui s’était cru ministre, prétexta une attaque de goutte, et pendant plusieurs jours ne sortit point de sa forteresse. La bourgeoisie et par suite le petit peuple conclurent, de ce qui se passait, qu’il était clair que le prince avait ré-