Aller au contenu

Page:Stendhal - La chartreuse de Parme (Tome 2), 1883.djvu/311

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 307 —

la fin du premier acte, il avait presque les larmes aux yeux ; la duchesse se tenait auprès de lui, mais froide et immobile. Le prince, se trouvant un instant seul avec elle, dans le foyer des acteurs, alla fermer la porte.

— Jamais, lui dit-il, je ne pourrai jouer le second et le troisième acte ; je ne veux pas absolument être applaudi par complaisance ; les applaudissements qu’on me donnait ce soir me fendaient le cœur. Donnez-moi un conseil, que faut-il faire ?

— Je vais m’avancer sur la scène, faire une profonde révérence à son altesse, une autre au public, comme un véritable directeur de comédie, et dire que l’acteur qui jouait le rôle de Lelio, se trouvant subitement indisposé, le spectacle se terminera par quelques morceaux de musique. Le comte Rusca et la petite Ghisolfi seront ravis de pouvoir montrer à une aussi brillante assemblée leurs petites voix aigrelettes.

Le prince prit la main de la duchesse, et la baisa avec transport.

— Que n’êtes-vous un homme, lui dit-il, vous me donneriez un bon conseil : Rassi vient de déposer sur mon bureau cent quatre-vingt-deux dépositions contre les prétendus assassins de mon père. Outre les dépositions, il y a un acte d’accusation de plus de deux cents pages ; il me faut lire tout cela, et, de plus, j’ai donné ma parole