je pense encore à ces deux espions que je fis fusiller un peu légèrement en Espagne. Eh bien ! voulez-vous que je vous défasse de Rassi ? Le danger qu’il fait courir à Fabrice est sans bornes ; il tient un moyen sûr de me faire déguerpir.
Cette proposition plut extrêmement à la duchesse, mais elle ne l’adopta pas.
— Je ne veux pas, dit-elle au comte, que, dans notre retraite, sous ce beau ciel de Naples, vous ayez des idées noires le soir.
— Mais, chère amie, il me semble que nous n’avons que le choix des idées noires. Que devenez-vous, que deviens-je moi-même, si Fabrice est emporté par une maladie ?
La discussion reprit de plus belle sur cette idée, et la duchesse la termina par cette phrase :
— Rassi doit la vie à ce que je vous aime mieux que Fabrice ; non, je ne veux pas empoisonner toutes les soirées de la vieillesse que nous allons passer ensemble.
La duchesse courut à la forteresse ; le général Fabio Conti fut enchanté d’avoir à lui opposer le texte formel des lois militaires : personne ne peut pénétrer dans une prison d’État sans un ordre signé du prince.
— Mais le marquis Crescenzi et ses musiciens viennent chaque jour à la citadelle ?
— C’est que j’ai obtenu pour eux un ordre du prince.