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vouement ; il a ordre de remonter de station en station pour savoir où et comment Fabrice a été arrêté.

En entendant prononcer ce nom de Fabrice la duchesse fut saisie d’une légère convulsion.

— Pardonnez, mon ami, dit-elle au comte dès qu’elle put parler ; ces détails m’intéressent fort, donnez-les-moi tous, faites-moi bien comprendre les plus petites circonstances.

— Eh bien, madame, reprit le comte en essayant un petit air de légèreté pour tenter de la distraire un peu, j’ai envie d’envoyer un commis de confiance à Bruno et d’ordonner à celui-ci de pousser jusqu’à Bologne ; c’est là, peut-être, qu’on aura enlevé notre jeune ami. De quelle date est sa dernière lettre ?

— De mardi, il y a cinq jours.

— Avait-elle été ouverte à la poste ?

— Aucune trace d’ouverture. Il faut vous dire qu’elle était écrite sur du papier horrible ; l’adresse est d’une main de femme, et cette adresse porte le nom d’une vieille blanchisseuse parente de ma femme de chambre. La blanchisseuse croit qu’il s’agit d’une affaire d’amour, et la Chékina lui rembourse les ports de lettres sans y rien ajouter. Le comte, qui avait pris tout à fait le ton d’un homme d’affaires, essaya de découvrir, en discutant avec la duchesse, quel pouvait avoir été le jour de l’enlèvement à Bologne. Il s’aperçut alors