Page:Stendhal - Lamiel, éd. Stryienski, 1889.djvu/123

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

vingt mille livres de rente et qui, dans le fait, ayant un seul fils, âgé de dix-sept ans, élève de l’École polytechnique, pouvait dépenser près de deux cent mille francs par an.

« J’empoignerais l’esprit de ce fils, je m’en ferais adorer, se disait Sansfin, en se promenant solitairement sur la colline de Sainte-Catherine, qui domine Rouen ; et, dans tous les cas, en mettant tout au pis, qui m’empêcherait de m’enfuir en Amérique avec une bourse de cent mille francs ? Là, sous un nom supposé, M. Petit ou M. Pierre Durand, je recommencerais la carrière médicale, et, d’ailleurs, j’aurais si bien arrangé les affaires, en emportant mes cent ou deux cent mille francs, que la duchesse et son fils se couvriraient de ridicule s’ils s’avisaient de me poursuivre. »

Sansfin revint à Carville ; la guérison de Lamiel allant très vite, et pouvant donner à Mme  de Miossens l’idée de retourner au château, Sansfin eut recours à des drogues qui augmentèrent les apparences de l’indisposition de Lamiel.

Dans cet état de choses, Sansfin allait à la chasse, dans la forêt d’Imberville ; là, un jour, au lieu de chasser, il rêva profondément.

« Eh bien ! soit, se dit-il, en s’asseyant sur les