Page:Stendhal - Lamiel, éd. Stryienski, 1889.djvu/134

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mulé, tandis que cette quantité d’étoffes, placées sur ses épaules déjà trop proéminentes, ne faisait que rendre ses défauts plus sensibles ; eh bien ! dès les premières fraîcheurs de soirée, au mois de septembre, il apercevait avec reconnaissance, au bout de la place, le premier homme de la bonne société de Carville qui s’avisait d’arborer un manteau. À l’instant, il courait chez lui et disait à toutes ses visites de soir :

— J’ai pris un manteau, c’est M. un tel qui m’en a donné l’exemple. Rien n’est dangereux comme les premiers froids, ils peuvent répercuter sur la poitrine les humeurs que la transpiration insensible faisait disparaître et beaucoup de phtisies n’ont pas eu d’autres causes.

Cette habitude du docteur le servait parfaitement auprès des femmes.

Son premier pas, c’était de les isoler sous prétexte de maladie ; par ce moyen simple, il les jetait dans l’ennui ; puis il les amusait par ses mille attentions, et quelquefois parvenait à faire oublier son étrange difformité. Pour mettre sa vanité à l’aise, il avait pris l’habitude salutaire de ne pas compter ses défaites, mais seulement ses succès.

« Fait comme je suis, s’était-il dit de bonne