Page:Stendhal - Lamiel, 1928, éd. Martineau.djvu/113

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lieu et le médecin bossu se dit « Je serai le remède. » Il entreprit d’amuser la jeune malade et de lui peindre la vie en beau ; il employa vingt moyens ; par exemple, il prit un abonnement à la Gazette des Tribunaux, et on la lisait à Lamiel tous les matins. Les crimes l’intéressaient, elle était sensible à la fermeté d’âme déployée par certains scélérats. En moins de quinze jours l’extrême pâleur de Lamiel sembla diminuer. La duchesse le remarquait un jour.

— Eh bien ! madame, s’écria Sansfin avec hauteur, est-ce qu’il convient d’appeler des médecins de Paris quand on a un docteur Sansfin dans le voisinage ? Un curé peut avoir de l’esprit, mais quand cet esprit est troublé par l’envie, convenez qu’il ressemble comme deux gouttes d’eau à de la sottise. Sansfin voit ce qui est vrai partout, mais je dois avouer que les sciences que j’étudie pour essayer de me perfectionner dans mon art me laissent si peu de temps à perdre, que je dis quelquefois la vérité en termes trop clairs et trop précis, et, je le sais, les salons dorés frémissent d’entendre ce langage simple d’un homme vertueux qui n’a besoin de faire la cour à personne. Par égoïsme, pour ne pas vous séparer d’une femme de chambre qui vous amuse, vous n’avez pas voulu d’abord que