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Page:Stendhal - Lamiel, 1928, éd. Martineau.djvu/198

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lieu d’espérer, ce me semble, que tu me laisseras bien porter, les jours de fête et les dimanches seulement, la plus mauvaise de tes robes ?

Lamiel resta stupéfaite, un tel langage eût été impossible au château : Mme Anselme et les autres femmes de la duchesse avaient bien des sentiments bas mais savaient les exprimer d’une tout autre façon. À la vue de ces robes, Mme Anselme se fût jetée dans les bras de Lamiel, l’eût accablée de baisers et de félicitations, puis, lui aurait demandé en riant de lui prêter une de ces robes qu’elle lui aurait désignée par la couleur. Cette demande de robe consterna la jeune fille ; des réflexions pénibles arrivaient en foule, elle n’avait donc personne à aimer, les gens qu’elle s’était figurée comme parfaits, du moins du côté du cœur, étaient aussi vils que les autres ! « Je n’ai donc personne à aimer ! »

Pendant qu’elle se livrait à ces réflexions pénibles, elle restait immobile, debout, et son air était sérieux. La tante Hautemare en conclut que la chère nièce hésitait à lui prêter une des robes qui se trouvaient dans les paquets, et alors, pour la décider, elle se mit à lui détailler tous les services qu’elle lui avait rendus avant son admission au château.