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Page:Stendhal - Lamiel, 1928, éd. Martineau.djvu/282

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cette triste ville avec les Anglais ruinés. Grand Dieu ! quelles soirées je passerai !

Lamiel s’ennuyait à mourir, il ne fallut au comte que deux jours de soins.

— Vous me conduisez au spectacle ce soir ? lui dit Lamiel.

— Ce soir, si mes affaires sont finies, je compte me brûler la cervelle.

Lamiel jeta un cri et le comte fut heureux de l’effet qu’il produisait.

— Vous aurez ma dernière pensée, belle Lamiel, vous aurez été mon dernier bonheur. Si, il y a huit jours, vous eussiez été moins cruelle pour moi, je ne serais pas allé aux courses de Chantilly, j’y ai perdu cinquante-sept mille francs ; j’ai payé, comme l’honneur le voulait, en épuisant toutes mes ressources et il ne me reste pas un billet de mille. Mais le comte Nerwinde, le fils d’un héros connu de toute la France, ne doit point se laisser voir dans une position inférieure. J’ai bien une espèce de sœur fort riche, mon aînée de vingt ans, mais c’est une tête étroite, peu digne de comprendre une vie dirigée par l’amour et le hasard. De plus, elle a épousé un Miossens et moi je ne suis qu’un d’Aubigné-Nerwinde.

— Un Miossens, parent du duc ?

— Son grand-oncle, mais d’où savez-vous ce nom ?