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la vie de campagne

galopera les ultras. Sur le vaisseau de l’État, tout le monde voudra s’occuper de la manœuvre, car elle est bien payée. N’y aura-t-il donc jamais une pauvre petite place pour le simple passager ?

— Au fait, au fait, qui doit être fort plaisant avec ton caractère tranquille. Sont-ce les dernières élections qui te chassent de ta province ?

— Mon mal vient de plus loin. J’avais, il y a quatre ans, quarante ans et cinq cent mille francs, j’ai quatre ans de plus aujourd’hui, et probablement cinquante mille francs de moins, que je vais perdre sur la vente de mon château de Monfleury, près du Rhône, position superbe.

À Paris, j’étais las de cette comédie perpétuelle, à laquelle oblige ce que vous appelez la civilisation du XIXe siècle. J’avais soif de bonhomie et de simplicité. J’achète une terre dans les montagnes près du Rhône, rien d’aussi beau sous le ciel.

Le vicaire du village et les hobereaux du voisinage me font la cour pendant six mois ; je leur donne à dîner ; j’ai quitté Paris, leur dis-je, pour de ma vie ne parler ni n’entendre parler politique. Comme vous le voyez, je ne suis abonné à aucun journal. Moins le facteur de la poste m’apporte de lettres, plus je suis content.

Ce n’était pas le compte du vicaire ;