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la note secrète

matin j’aurai l’honneur de le lui réciter tout entier.

— Quoi ! même les annonces ?

— Fort exactement, et sans qu’il y manque un mot.

— M’en donnez-vous votre parole ? reprit le marquis avec une gravité soudaine.

— Oui, monsieur, la crainte d’y manquer pourrait seule troubler ma mémoire.

— C’est que j’ai oublié de vous faire cette question hier : je ne vous demande pas votre serment de ne jamais répéter ce que vous allez entendre ; je vous connais trop pour vous faire cette injure. J’ai répondu de vous, je vais vous mener dans un salon où se réuniront douze personnes ; vous tiendrez note de ce que chacun dira.

Ne soyez pas inquiet, ce ne sera point une conversation confuse, chacun parlera à son tour, je ne veux pas dire avec ordre, ajouta le marquis en reprenant l’air fin et léger qui lui était si naturel. Pendant que nous parlerons, vous écrirez une vingtaine de pages ; vous reviendrez ici avec moi, nous réduirons ces vingt pages à quatre. Ce sont ces quatre pages que vous me réciterez demain matin au lieu de tout le numéro de la Quolidienne. Vous partirez aussitôt après ; il faudra courir la poste comme un jeune homme qui voyage pour