Page:Stendhal - Le Rouge et le Noir, II, 1927, éd. Martineau.djvu/298

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
297
la prude

grand effort d’imagination, elle voyait en vous le héros qu’elle avait rêvé, et non pas ce que vous êtes réellement…

Mais que diable, ce sont là les éléments, mon cher Sorel, êtes-vous tout à fait un écolier ?…

Parbleu ! entrons dans ce magasin ; voilà un col noir charmant, on le dirait fait par John Anderson, de Burlington-street : faites-moi le plaisir de le prendre, et de jeter bien loin cette ignoble corde noire que vous avez au cou.

Ah ça, continua le prince en sortant de la boutique du premier passementier de Strasbourg, quelle est la société de madame de Dubois ? grand Dieu ! quel nom ! Ne vous fâchez pas, mon cher Sorel, c’est plus fort que moi… À qui ferez-vous la cour ?

— À une prude par excellence, fille d’un marchand de bas immensément riche. Elle a les plus beaux yeux du monde, et qui me plaisent infiniment ; elle tient sans doute le premier rang dans le pays ; mais au milieu de toutes ses grandeurs, elle rougit au point de se déconcerter si quelqu’un vient à parler de commerce et de boutique. Et par malheur, son père était l’un des marchands les plus connus de Strasbourg.

— Ainsi si l’on parle d’industrie, dit le