Page:Stendhal - Le Rouge et le Noir, II, 1927, éd. Martineau.djvu/453

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


CHAPITRE XLII


En ramenant Julien en prison, on l’avait introduit dans une chambre destinée aux condamnés à mort. Lui qui, d’ordinaire, remarquait jusqu’aux plus petites circonstances, ne s’était point aperçu qu’on ne le faisait pas remonter à son donjon. Il songeait à ce qu’il dirait à madame de Rênal, si, avant le dernier moment, il avait le bonheur de la voir. Il pensait qu’elle l’interromprait, et voulait du premier mot pouvoir lui peindre tout son repentir. Après une telle action, comment lui persuader que je l’aime uniquement ? car enfin, j’ai voulu la tuer par ambition ou par amour pour Mathilde.

En se mettant au lit il trouva des draps d’une toile grossière. Ses yeux se dessillèrent. Ah ! je suis au cachot, se dit-il, comme condamné à mort. C’est juste…

Le comte Altamira me racontait que, la veille de sa mort, Danton disait avec sa grosse voix : C’est singulier, le verbe guillotiner ne peut pas se conjuguer dans tous ses temps ; on peut bien dire : Je serai