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un diplomate

de coups de cravache ne fut que l’affaire d’un instant. Deux laquais voulurent défendre leur camarade ; Julien reçut des coups de poing : au même instant il arma un de ses petits pistolets et le tira sur eux ; ils prirent la fuite. Tout cela fut l’affaire d’une minute.

Le chevalier de Beauvoisis descendait l’escalier avec la gravité la plus plaisante, répétant avec sa prononciation de grand seigneur : Qu’est ça ? qu’est ça ? Il était évidemment fort curieux, mais l’importance diplomatique ne lui permettait pas de marquer plus d’intérêt. Quand il sut de quoi il s’agissait, la hauteur le disputa encore dans ses traits au sang-froid légèrement badin qui ne doit jamais quitter une figure de diplomate.

Le lieutenant du 96e comprit que M. de Beauvoisis avait envie de se battre : il voulut diplomatiquement aussi conserver à son ami les avantages de l’initiative. — Pour le coup, s’écria-t-il, il y a là matière à duel ! — Je le croirais assez, reprit le diplomate.

— Je chasse ce coquin, dit-il à ses laquais ; qu’un autre monte. On ouvrit la portière de la voiture : le chevalier voulut absolument en faire les honneurs à Julien et à son témoin. On alla chercher un ami de M. de Beauvoisis, qui indiqua