Page:Stendhal - Lucien Leuwen, II, 1929, éd. Martineau.djvu/212

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l’une des premières places, l’ennuyait. Le service de Charles X, ou ce qu’il appelait la politique, donnait un aliment à son envie de faire, de travailler, d’être compté. Ses flatteurs lui disaient : « Si des bataillons prussiens ou russes nous ramènent Charles X, vous serez député, ministre, etc. Vous serez le Villèle de cette nouvelle position. »

— Alors comme alors, répondait Du Poirier.

En attendant, il avait tous les plaisirs de l’ambition conquérante. Voici comment : MM. de Puylaurens et de Pontlevé avaient reçu des pouvoirs de qui de droit pour diriger les efforts des royalistes dans la province dont Nancy était le chef-lieu ; Du Poirier ne devait être que l’humble secrétaire de cette commission ou plutôt de ce pouvoir occulte, lequel n’avait qu’une chose de raisonnable : il ne se divisait pas. Il était confié à M. de Puylaurens, en son absence à M. de Pontlevé, en l’absence de ce dernier à M. Du Poirier, et cependant depuis un an Du Poirier faisait tout. Il rendait des comptes fort légers aux deux titulaires de l’emploi et ceux-ci ne se fâchaient pas trop. C’est qu’il avait l’art de leur faire entrevoir la guillotine, ou tout au moins le château de Ham, au bout de leurs menées, et ces