Page:Stendhal - Lucien Leuwen, III, 1929, éd. Martineau.djvu/101

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— Voilà Caen, dit Coffe.

La gaieté de Leuwen le quitta aussitôt ; et, se tournant vers Coffe avec un grand soupir :

— Je pense tout haut avec vous, mon cher Coffe. J’ai toute honte bue, vous m’avez vu pleurer… Quelle nouvelle infamie vais-je faire ici ?

— Effacez-vous ; bornez-vous à seconder les mesures du préfet ; travaillez moins sérieusement à la chose.

— Ce fut une faute d’aller loger à la préfecture.

— Sans doute, mais cette faute part du sérieux avec lequel vous travaillez et de l’ardeur avec laquelle vous marchez au résultat.

En approchant de Caen, les voyageurs remarquèrent beaucoup de gendarmes sur la route, et certains bourgeois, marchant raide, en redingote, et avec de gros bâtons.

— Si je ne me trompe, voici les assommeurs de la Bourse, dit Coffe.

— Mais a-t-on assommé à la Bourse ? N’est-ce pas la Tribune qui a inventé cela ?

— Pour ma part, j’ai reçu cinq ou six coups de bâton, et la chose aurait mal fini, si je ne me fusse trouvé un grand compas avec lequel je fis mine d’éventrer