Page:Stendhal - Lucien Leuwen, III, 1929, éd. Martineau.djvu/42

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homme ne doit pas être insensible à un ruban rouge qui ferait un bel effet dans son portrait. Dans tous les cas, c’est un hâbleur imprudent et vide qui, à la Chambre, fera tort à son parti. Vous étudierez les moyens de capter Malot, en cas de non-réussite pour le fidèle Blondeau.

Mais la grande affaire, c’est Caen, dans le Calvados. Vous donnerez un jour ou deux aux affaires de Champagnier, et vous vous rendrez en toute hâte à Caen. Il faut à tout prix que M. Mairobert ne soit pas élu. C’est un homme de tête et d’esprit ; avec douze ou quinze têtes comme cela, la Chambre serait ingouvernable. Je vous donne à peu près carte blanche en argent, places à accorder et destitutions. Ces dernières seules pourraient être contrariées par deux pairs, des nôtres, qui ont de grands biens dans le pays. Mais dans tous les cas la Chambre des pairs n’est pas gênante, et je ne veux à aucun prix de M. Mairobert. Il est riche, il n’a pas de parents pauvres et il a la croix. Ainsi, rien à faire de ce côté-là.

Le préfet de Caen, M. Boucaut de Séranville, a tout le zèle qui ne vous brûle pas ; il a fait lui-même un pamphlet contre M. Mairobert, et il a eu l’étourderie de le faire imprimer là-bas, dans le chef-lieu de sa préfecture. Je viens de lui ordonner,