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ŒUVRES DE STENDHAL.

tre beaucoup d’assiduité à son bureau, et de l’activité pendant les heures qu’il consacre à gagner de l’argent et à faire sa fortune.

Ces mœurs sont à peu près celles de l’Italie il y a cinquante ans, et avant que Voltaire eût donné des craintes aux prêtres sur la continuation de leur empire, et les eût portés à se rapprocher des mœurs protestantes et de la vie triste.

Il ne faut donc pas s’étonner de trouver à Marseille et en Provence une partie de ce luxe qui, en Italie, embellit la religion et fait un plaisir des devoirs du chrétien. François Marchetti publia, en 1683, un volume in-8o, qui contient la description des usages sacrés des Marseillais. Les plaisanteries de Voltaire et la Révolution ont détruit beaucoup de ces coutumes ; mais le Français du Nord est encore étonné de bien des choses. Beaucoup de maisons ont leurs portes marquées d’une croix, qu’on fait le jour de la Chandeleur, avec de la cire ou de la fumée : cette pratique a pour objet d’éloigner l’esprit malin. En entrant dans les églises, on est frappé de la singularité des crucifix : le Christ sur la croix est presque toujours vêtu d’un ample caleçon. Il est des églises où le Christ, outre le caleçon, a une tunique blanche et une chasuble amarante : ce sont les marques du sacerdoce et de la royauté.

Dans les grandes solennités, l’intérieur des églises est tendu en damas cramoisi avec des bordures en galon d’or.

Pendant le mois qui précède Noël, on entend dans les rues des aubades un peu sauvages, que l’on appelle ici aubades de Calène : c’est le symbole un peu dégénéré des concerts angéliques qui annoncèrent la naissance du Sauveur.


— Marseille, le..... 1837.

Je suis arrivé au Musée par les belles allées de Meillan. J’ai cherché aussitôt le saint Jean écrivant l’Apocalypse, par Raphaël. C’est un des moins bons tableaux de ce grand homme. Le bras de saint Jean est repeint ; c’est une réplique du saint Jean de la galerie Giustiniani, que j’ai vu à Berlin.