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MÉMOIRES D’UN TOURISTE

à deux heures du matin, j’ai eu besoin de l’exercice de toute ma raison pour prendre sur moi de me coucher. De ma vie la lecture de Grégoire de Tours ne m’a donné autant d’idées. Quelle candeur ! et c’était un évêque ! Quel contraste avec nos historiens alambiqués, qui prétendent à des vues nouvelles et de génie, et que tout le monde sait vendus à l’espoir d’une place à l’Académie, ou d’un avantage d’argent !



— Tours, le 23 juin.

À dix heures je suis allé au café, je me suis trouvé au milieu d’une trentaine d’officiers en grande tenue. J’avais apporté mon thé, ce qui a fait faire la mine à la maîtresse du logis ; mais peu m’importe, tout est rompu entre les provinciaux et moi. J’ai presque été obligé de me fâcher pour avoir de l’eau bouillante. La mauvaise humeur de la mégère du café ne m’a point empêché de goûter l’excellence de mon thé ; il y a dix ans mon cœur eût été rongé de colère.

J’avais Quentin Durward dans ma poche ; je suis allé à pied, en lisant, au village de Riche, à vingt minutes de Tours, où l’on voit encore quelques restes du château de Plessis-lez-Tours. Il était bâti en briques ;