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rosaire et le chapelet à la main, en accompagnant le coup de stylet d’un per amor di Dio.

Un bandit, accusé de quantité d’assassinats, comparaissait devant ses juges ; loin de nier les crimes qu’on lui imputait, il en avoua d’autres jusque-là ignorés de la justice ; mais lorsqu’on en vint à lui demander s’il avait observé exactement les jours de jeûne le coquin dévôt se fâcha. Ce doute était l’offense la plus grave. « Me soupçonnez-vous donc de n’être point chrétien ? » dit-il amèrement au magistrat qui l’interrogeait.

L’histoire de ces hommes extraordinaires, depuis qu’ils ont acquis de la célébrité, serait longue et curieuse ; mais outre qu’il y aurait de la difficulté à en réunir les éléments, je n’ai eu ni le temps ni la volonté d’en faire la recherche. Pour ne parler que de ceux sur lesquels on a des renseignements exacts, puisqu’ils sont nos contemporains, mon récit ne manquera pas d’un certain intérêt.

Un homme digne de foi, M. Tambroni, affirma qu’il y a eu dans l’État papal dix-huit mille assassinats pendant le règne de Pie VI (de 1775 à 1800). Il y en avait eu dix mille, dont quatre mille à Rome même, sous Clément XIII. On sait que sous le pontificat de Pie VII, un grand