Page:Stendhal - Pages d’Italie.djvu/344

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proposa, m’a-t-on dit, de se diriger vers la rivière. Son conseil fut malheureusement suivi. Toute la cavalcade défila par la Porta del Popolo, et prit la route du Tibre. On fut bientôt au Ponte Molle. À droite du chemin, sur le bord de l’eau, un petit sentier conduit à une vigne. Chacun désirait jouir aussi bien que possible de la vue du paysage ; et, sans réfléchir aux changements qui avaient eu lieu depuis une dernière visite, on s’engagea dans l’entreprise hasardeuse de gagner la porte de la vigne, pour contempler de là à loisir les eaux « jaunâtres et irritées ». Le sentier était étroit ; on fut obligé d’avancer un à un. Tous descendirent de cheval, excepté miss Bathurst. Ce fut une circonstance funeste, mais de peu d’importance si elle ne se fût liée à d’autres. Arrivé au terme, on trouva la porte de la vigne fermée, contre l’ordinaire, et il fallut redescendre. Le sentier était glissant, la rive du Tibre escarpée, le fleuve rapide et très gonflé. Le cheval hésita ; elle voulut le pousser en avant ; il recula, son pied de derrière glissa, et l’instant d’après le cheval et la jeune fille furent précipités au milieu même du torrent. La consternation fut terrible : tout le monde perdit sa présence d’esprit. On assure que personne ne savait nager, excepté le domestique de miss Bathurst,