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pensées

ne point partir. Je le persuade de nouveau, il me dit pendant que je lui parlais : « oui, mais vous aurez toute la gloire de ce départ », excellent trait de vanité.

Là-dessus il n’écoute plus guère ce que je lui dis, et va aux Tuileries pour réfléchir, et se trouver près de ses parents, il regarde cela comme beaucoup, tant il est vrai qu’il ne sent pas d’autre force que celle de la passion.

Voilà ce me semble comme sont les femmes ; il est possible que je l’emporte, j’ai mis en jeu la vanité. Toute cette affaire me le montre profondément faible. J’en avais déjà deux preuves ; 1o la loterie signée avec tant d’enthousiasme, et abandonnée deux mois après ; 2o le jeu où il me promit tant de ne pas retourner, et où il a perdu encore hier trois louis.

Son esprit est beaucoup moins rapide que le mien, ainsi quand je veux être entendu il ne faut pas lui montrer trop d’idées (il a cela de commun avec Mante, chose à remarquer entre deux hommes si différents), mais lui en bien expliquer un petit nombre. Jamais un tel homme ne pourra remonter jusqu’au plan qui fait que je lui offre telle ou telle idée, et dans tel ou tel ordre.

Excellent original à étudier, et homme avec qui il est agréable de vivre, en