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ROMANS ET NOUVELLES

enrichie de pierreries, et dont le mouvement était le seul bruit qui s’entendait dans l’appartement.

— « Dieu sait les cris que va pousser le maître de toutes ces choses précieuses, lorsqu’il va se réveiller en sursaut et m’apercevoir ; mais il faut en finir, se dit-il. Voici plus d’un quart d’heure que je perds en vains ménagements et dans le fol espoir de n’être pas pris pour un voleur. » Résolu à s’avancer, il lâcha la porte qu’il retenait toujours de la main gauche[1]. Elle roula sur ses gonds et se referma avec un petit bruit. « Me voici prisonnier », se dit le fugitif.

Par un mouvement instinctif, il s’approcha de la porte : il était impossible de l’ouvrir d’en dedans. Fort piqué de cette circonstance, il avança résolument vers le lit. Les rideaux étaient entièrement fermés. Il les ouvrit en faisant toutes sortes d’excuses ridicules au personnage qu’il ne trouva point, car le lit était vide, mais dans un assez grand désordre qui montrait qu’il avait été récemment occupé. Les draps, d’une toile admirable, étaient bordés de dentelles. Le chevalier prit la bougie, pour mieux y voir ; il mit la main

  1. Stendhal par distraction, avait écrit cette phrase à la première personne : « Résolu à m’avancer, je lâchai la porte que je retenais… » N. D. L. E.