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FÉDER

dement sur ce motif d’excuse pour songer à la réponse qu’il fallait faire.

— Qu’un tel propos ne se renouvelle jamais, monsieur, ou je suis saisie d’une maladie soudaine, que votre insolence, du reste, est bien capable de me donner, et je ne vous reverrai jamais ; le portrait en restera là. Et désormais faites-moi l’honneur de ne m’adresser la parole que pour les choses absolument indispensables.

En prononçant ces derniers mots, Valentine se leva et s’approcha de la cheminée, pour sonner sa femme de chambre, qu’elle aurait chargée d’aller appeler M. Boissaux, ou Delangle, son frère, avec lesquels elle aurait parlé de quelque petit voyage à faire dans les environs de Paris. Sa main avait déjà saisi le ruban de la sonnette. « Mais non, se dit-elle, ils verraient quelque chose dans mes yeux. » Elle reculait déjà devant le projet de rompre absolument avec Féder.

Celui-ci, de son côté, était bien tenté de prendre la balle au bond. « Quelle excellente manière, se disait-il, de rompre avec cette jeune femme ! Il n’est pas impossible que je sois le premier homme qui l’attaque ; alors toute sa vie elle se souviendra de ce portrait, laissé non fini. » Féder pensait vite comme toutes les âmes ardentes ; il fut violemment tenté de continuer à par-