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FÉDER


d’un membre de l’Institut, feront plus d’honneur aux gens qui en auront !

Valentine ne parlait pas plus que Féder ; ses regards et sa voix, profondément émus, trahissaient une vive préoccupation. Malgré les désaveux si expressifs qui avaient suivi l’offense de si près, depuis la veille Valentine se répétait ces convictions charmantes : « Il ne m’a point dit qu’il m’aimait par présomption, encore moins par insolence, le pauvre garçon ; il me l’a dit parce que c’est vrai. » Mais alors apparaissaient à ses yeux les désaveux si énergiques du peintre, et le jugement qu’il fallait en porter venait occuper toute l’attention de la jeune femme.

Au milieu des battements précipités de son cœur, les doutes légers qui lui restaient encore l’empêchaient de s’indigner de cette chose terrible qu’en style de province on appelle une déclaration. Alors il vint à Valentine une extrême curiosité de connaître l’histoire de Féder. Elle se rappelait que, dans les premiers moments où son frère lui avait parlé de faire faire son portrait, il lui avait dit ces propres mots : « Un jeune peintre d’un talent pyramidal, qui a à l’Opéra les succès les plus magnifiques ! » Mais elle n’osait plus remettre Delangle sur ce sujet et lui demander de nouveaux détails. Valentine cherchait sans