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meunier, ce que tout le monde savait au couvent, faisait copier tous les lundis, par Valentine, un chapitre de la Philothée de saint François de Sales ; et, le lendemain, la jeune fille était obligée d’expliquer ce chapitre à la religieuse pauvre, comme si celle-ci eût ignoré tout ce dont il était question dans le livre. Tous les jeudis Valentine copiait un chapitre de l’Imitation de Jésus-Christ, qu’également il fallait expliquer le lendemain. Et la religieuse, à laquelle une vie malheureuse avait appris le vrai sens des mots, ne souffrait, dans les explications de la jeune fille, aucune expression vague, aucun mot qui n’expliquât pas nettement la pensée ou le sentiment de l’élève. La religieuse et l’élève eussent été sévèrement punies, si madame la supérieure se fût aperçue de cette manœuvre. Ce qui est prohibé par-dessus tout, dans les couvents bien pensants, ce sont les amitiés particulières : elles pourraient donner aux âmes quelque énergie.

Même, avant cet éclat de rire si cruel, surtout par l’importance que M. Delangle semblait y ajouter, Valentine, entendant parler dans le monde, comme choses reçues, de faits ou d’idées qui eussent fait horreur au couvent, s’était dit qu’il fallait, pour conserver sa foi au milieu du monde, s’im-