et sans nulle crainte, de toutes les idées
que faisait naître chez elle la première
lecture si délicieuse, pour une femme de
son âge, de la Princesse de Clèves, de la
Nouvelle Héloïse, de Zadig ; elle avait
horreur de tout ce qui était ironique ; elle
sympathisait avec transport à l’expression
de tous les sentiments tendres. On peut
juger de l’état moral de Féder, chargé
d’expliquer de telles choses à une âme
aussi candide. Sans cesse il était sur le
point de se trahir, et ce n’était qu’avec
le plus grand effort de volonté qu’il parvenait
à ne point dire qu’il aimait. Chaque
jour il avait le plaisir d’admirer l’esprit
étonnant de Valentine.
Le lecteur se souvient peut-être que, vers la fin de la Nouvelle Héloïse, Saint-Preux arrive à Paris et raconte à son amie l’impression que cette grande ville produit sur lui. L’idée que Valentine s’était formée de Paris était fort différente ; Féder admirait la justesse d’esprit avec laquelle elle avait tiré des conséquences du petit nombre de faits qu’elle avait été à même d’observer ; ses erreurs même avaient un charme particulier. Elle ne pouvait concevoir, par exemple, que toutes ces jolies calèches qui parcourent les ombrages du bois de Boulogne ne renferment, pour la plupart, que des femmes ennuyées. Pour Valentine, elle