Aller au contenu

Page:Stendhal - Romans et Nouvelles, II, 1928, éd. Martineau.djvu/41

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
29
LE COFFRE ET LE REVENANT

de don Fernando. J’aurais honte de l’avouer, si je n’espérais que le lecteur a quelque connaissance du caractère singulier et passionné des gens du Midi, don Fernando fut sur le point de s’évanouir quand, peu après que deux heures eurent sonné à l’horloge du couvent, il entendit, au milieu du silence profond, des pas légers monter l’escalier de marbre. Bientôt ils s’approchèrent de la porte. Il reconnut la démarche d’Inès ; et, n’osant affronter le premier moment d’indignation d’une personne si attachée à ses devoirs, il se cacha dans le coffre.

La chaleur était accablante, l’obscurité profonde. Inès se plaça sur son lit ; et bientôt à la tranquillité de sa respiration, don Fernando comprit qu’elle dormait. Alors seulement, il osa s’approcher du lit ; il vit cette Inès, qui depuis tant d’années était sa seule pensée. Seule, abandonnée à lui dans l’innocence de son sommeil, elle lui fit peur. Ce singulier sentiment fut augmenté quand il s’aperçut que, depuis deux ans qu’il ne l’avait vue, ses traits avaient pris une empreinte de dignité froide qu’il ne leur connaissait pas.

Peu à peu cependant le bonheur de la revoir pénétra dans son âme ; le demi-désordre d’une toilette d’été faisait un si