Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, I, 1927, éd. Martineau.djvu/285

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le même uniforme à tous les esprits, rien ne gêne le développement plantureux du sot italien. La naïveté qu’il met à vous conter ses bassesses incroyables amuse la première fois, ensuite révolte. Rien n’est plus incommode que la curiosité de crétin qui l’attache à l’étranger ; et, si vous le brusquez, cela peut passer pour un manque d’égards envers la société qui veut bien vous recevoir. Le sot épris d’une jolie femme qui le méprise, mais ne peut l’éloigner à cause de quelque lien de famille, est un être si nuisible, si méchant, si bas, qu’il donnerait des idées d’assassinat ; car il ne se relève que plus fier et plus dénonciateur auprès du mari, après les coups de bâton. Du moins c’est ce que m’a raconté l’aimable Valsantini ; car, dans ces affaires de galanterie, je n’ai point d’expérience. Je crois qu’il n’y eut jamais voyageur en Italie moins fortuné que moi, ou les autres sont bien menteurs.

Les Napolitains se battent fort bien à l’épée ; l’éducation des hautes classes est souvent très-distinguée. (J’ai vu de jeunes princes ressembler à des Anglais.) Ces deux raisons rendent le sot importun moins fréquent à Naples qu’ailleurs. À Rome, l’opinion en fait justice et l’exile dans les cafés. En y réfléchissant, je vois que je n’ai pas connu un seul abbé qui fût un