Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, I, 1927, éd. Martineau.djvu/51

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parler à cette jeune femme. Elle s’appelle Gina, comme vous savez ; elle était la femme d’un noble fort riche. Zilietti parvint à l’enlever. Depuis seize ans il l’adore, mais ne peut l’épouser, car le mari vit toujours.

« Il y a six mois, l’amant de Gina était malade, car depuis deux ans elle a un amant, Malaspina, ce poëte si joli homme que vous avez vu chez la Bibin Catena. Zilietti, toujours amoureux comme le premier jour, est fort jaloux. Il passe exactement tout son temps dans ses bureaux ou avec Gina. Celle-ci, désespérée de savoir son amant en danger, et sachant bien que tous ses domestiques sont payés au poids de l’or pour rendre compte de ses démarches, fait arrêter sa voiture à la porte du Dôme, et, par le passage souterrain de cette église, du côté de l’archevêché, elle va acheter des cordes et des habits d’homme tout faits, chez un fripier. Ne sachant comment les emporter, elle passe ces habits d’homme sous ses vêtements, et regagne sa voiture sans accident. En arrivant chez elle, elle est indisposée et s’enferme dans sa chambre. À une heure après minuit, elle descend de son balcon dans la rue avec ses cordes qu’elle a arrangées grossièrement en échelle. Son appartement est un piano nobile (premier étage)