Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, II, 1927, éd. Martineau.djvu/120

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famille ennemie, et enfin avait pris la fuite avec cet homme, il a mis les affaires de son maître dans le plus grand ordre, et s’est allé brûler la cervelle dans un bois à une lieue d’ici. Ce qui est exactement raisonnable ne donne pas prise aux beaux-arts ; j’estime un sage républicain des États-Unis, mais je l’oublie à tout jamais en quelques jours : ce n’est pas un homme pour moi, c’est une chose. Je n’oublierai jamais le pauvre Cosimo ; cette déraison m’est-elle personnelle ? Le lecteur va répondre. Je ne trouve rien à blâmer, mais rien d’intéressant chez les sages Toscans. Par exemple, leur cœur ne fait aucune différence entre le droit d’être libre et la tolérance de faire ce qui leur plaît, dont ils jouissent sous un prince (Ferdinand III) rendu sage par l’exil, mais qui jadis fit commencer cinq mille procès de tendance au jacobinisme contre pareil nombre de ses sujets (sic dicitur).

Le bourgeois toscan, d’un esprit timide, jouit du calme et du bien-être, travaille à s’enrichir et un peu à s’éclairer, mais sans songer le moins du monde à prendre place dans le gouvernement de l’État. Cette seule idée, qui le détournerait du soin de son petit pécule, lui fait une peur horrible, et les nations étrangères qui s’en occupent lui semblent un ramassis de fous.