Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, II, 1927, éd. Martineau.djvu/244

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ment voir les ruines de Sélinonte et de la sculpture d’une antiquité bien plus reculée que tout ce que je connais.

J’ajoute de mémoire quelques faits que je n’osai pas écrire à Naples. Pendant la course en Calabre dont il s’agit, j’entendis parler, chez les fermiers d’un de mes compagnons de voyage, de vols sans nombre exécutés par la troupe de l’Indépendance. Il y avait du talent, et une bravoure turque dans l’exécution. Je ne fis nulle attention à tout cela : c’est l’usage. J’étais tout yeux pour les mœurs de ce peuple. Je fis l’aumône à une pauvre femme enceinte, veuve d’un militaire. L’on me dit : « Oh ! monsieur, elle n’est pas à plaindre, elle a la ration des brigands. » L’on me fit un récit que je transcris, en supprimant les détails de bravoure et d’audace.

« Il y a dans ces environs une compagnie composée de trente hommes et quatre femmes, tous supérieurement montés sur des chevaux de course. Le chef est un maréchal des logis di Jachino (du roi Joachim), qui s’intitule chef de l’Indépendance. Il ordonne aux propriétaires et aux massari de mettre tel jour telle somme au pied de tel arbre : sinon mort affreuse et incendie de la maison. Lorsque la compagnie marche, l’avant-veille tous