Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, II, 1927, éd. Martineau.djvu/284

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l’amour-propre, cet art nous fait croire à la pitié chez les hommes : il change la douleur sèche du malheureux en douleur regrettante : il fait couler les larmes ; sa consolation ne va pas plus loin. Aux âmes tendres, qui regrettent la mort d’un objet chéri, il ne fait que nuire et que hâter les progrès de la phtisie.

21 septembre. — Je viens de passer cinquante jours à admirer et à m’indigner. Quel séjour que la Rome antique, si, pour dernier outrage, sa mauvaise étoile n’avait pas voulu qu’on bâtit sur son sol la Rome des prêtres ! Que ne seraient pas le Colysée, le Panthéon, la basilique d’Antonin, et tant de monuments démolis pour faire des églises, restant fièrement debout au milieu de ces collines désertes, le mont Aventin, le Quirinal, le Palatin ! Heureuse Palmyre !

Saint-Pierre excepté, rien de plus plat que l’architecture moderne, si ce n’est la sculpture. Ce mot rappelle Canova, seule exception. Il fait mettre les bustes des grands artistes au Panthéon, lieu si cher aux âmes tendres, par la tombe de Raphaël. Tôt ou tard on lui ôtera le nom d’église, qui jadis la protégea contre le génie du christianisme : ce sera un musée sublime. La plupart des bustes commandés par