Page:Stendhal - Souvenirs d’égotisme, 1927, éd. Martineau.djvu/113

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solitaire par les ondes du lac de Côme, je me disais avec délices :

Hic captabis frigus opacum !

Si je laisse de quoi faire cette tablette, je prie qu’on la place dans le cimetière d’Andilly, près Montmorency, exposée au levant. Mais surtout je désire n’avoir pas d’autre monument, rien de parisien, rien de vaudevillique, j’abhorre ce genre. Je l’abhorrais bien plus en 1821. L’esprit français que je trouvais dans les théâtres de Paris allait presque jusqu’à me faire m’écrier tout haut : Canaille !… Canaille !… Canaille ! Je sortais après le premier acte. Quand la musique française était jointe à l’esprit français, l’horreur allait jusqu’à me faire faire des grimaces et me donner en spectacle. Mme de Longueville me donna un jour sa loge au théâtre Feydeau. Par bonheur, je n’y menai personne. Je m’enfuis au bout d’un quart d’heure, faisant des grimaces ridicules et faisant vœu de ne pas rentrer à Feydeau de deux ans : j’ai tenu ce serment.

Tout ce qui ressemble aux romans de Mme de Genlis, à la poésie de MM. Legouvé, Jouy, Campenon, Treneuil, m’inspirait la même horreur.