Page:Stendhal - Souvenirs d’égotisme, 1927, éd. Martineau.djvu/177

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mante marchande de cachets m’avoua qu’avant le billet de cinq cents francs de Maisonnette, elle n’avait jamais eu à elle un double napoléon.

Les gens riches sont bien injustes et bien comiques lorsqu’ils se font juges dédaigneux de tous les péchés et crimes commis pour de l’argent. Voyez les effroyables bassesses et les dix ans de soins qu’ils se donnent à la cour pour un portefeuille. Voyez la vie de M. le duc Decazes depuis sa chute en 1820, après l’action de Louvel, jusqu’à ce jour.

Me voici donc en 1822, passant trois soirées par semaine à l’Opéra-Bouffe et une ou deux chez Maisonnette, rue Caumartin. Quand j’ai eu du chagrin, la soirée a toujours été le moment difficile de ma vie. Les jours d’Opéra, de minuit à deux heures, j’étais chez Mme  Pasta avec Lussinge, Michevaux, Fiori, etc.

Je faillis à avoir un duel avec un homme fort gai et fort brave qui voulait que je le présentasse chez Mme  Pasta. C’est l’aimable Edouard Edwards, cet Anglais, le seul de sa race qui eût l’habitude de faire de la gaieté, mon compagnon de voyage en Angleterre, celui qui, à Londres, voulait se battre pour moi.

Vous n’avez pas oublié qu’il m’avait averti d’une vilaine faute : de n’avoir pas