Page:Stendhal - Souvenirs d’égotisme, 1927, éd. Martineau.djvu/179

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Or le savant, sage, tranquille, appliqué, docteur Edwards, avait en fort petite recommandation les amis de son frère Edouard. D’abord le docteur avait seize frères et mon ami était le plus mauvais sujet de tous. C’est à cause de son ton trop gai et de son amour passionné pour la plus mauvaise plaisanterie, qu’il ne voulait pas laisser perdre si elle lui venait, que je n’avais pas voulu le mener chez Mme Pasta. Il avait une grosse tête, de beaux yeux divagues et les plus jolis cheveux blonds que j’ai vus. Sans cette diable de manie de vouloir avoir autant d’esprit qu’un Français, il eût été fort aimable, et il n’eût tenu qu’à lui d’avoir les plus beaux succès auprès des femmes comme je le dirai en parlant d’Eugeny, mais elle est encore si jeune que peut-être il est mal d’en parler dans ce bavardage qui peut être imprimé dix ans après ma mort. Si je mets vingt, toutes les nuances de la vie seront changées, le lecteur ne verra plus que les masses. Et où diable sont les masses dans ces jeux de ma plume ? C’est une chose à examiner.

Je crois [que] pour se venger noblement, car il avait l’âme noble quand elle n’était pas offusquée par cinquante verres d’eau-de-vie, Edwards travailla beaucoup pour