Page:Stendhal - Vie de Napoléon.djvu/188

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHAPITRE XLIX

SUITE DES MINISTRES


Depuis deux siècles, un ministre, en France, est un homme qui signe quatre cents dépêches par jour, et qui donne à dîner ; c’est une existence absurde.

Sous Napoléon, ces pauvres gens se tuaient de travail, mais d’un travail sans pensée, mais d’un travail nécessairement absurde. Pour être bien reçu de l’empereur, il fallait toujours répondre au problème qu’il agitait au moment où l’on entrait. Par exemple, à combien monte le mobilier de tous mes hôpitaux militaires ? Le ministre qui ne répondait pas franchement et en homme qui ne se serait occupé que de cette idée toute la journée, était vilipendé, eût-il eu d’ailleurs les lumières du duc d’Otrante.

Quand Napoléon apprit que Crétet, le meilleur ministre de l’intérieur qu’il ait eu, allait succomber à une maladie mortelle, il dit : « Rien de plus juste ; un homme que je fais ministre, ne doit plus pouvoir pisser