terre fraîchement remuée montraient la quantité des corps qu’on avait enterrés ; des débris de chapeaux, d’habits, d’armes leur permettaient à peine de marcher : « Tenez, jeune homme, dit Napoléon à son frère, apprenez, par cette scène, que, pour un militaire, c’est autant une affaire de conscience que de prudence, d’étudier profondément son métier. Si le misérable qui a fait marcher ces braves gens à l’attaque avait su son métier[1], un grand nombre d’entre eux jouiraient maintenant de la vie et serviraient la République. Son ignorance les a fait périr, eux et des centaines d’autres, dans la fleur de la jeunesse et au moment où ils allaient acquérir de la gloire et du bonheur. »
Il prononça ces paroles avec émotion et presque les larmes aux yeux. Il est étrange qu’un homme, qui avait naturellement ces vifs sentiments d’humanité, ait pu se faire, dans la suite, le cœur d’un conquérant.
Bonaparte était chef de bataillon et commandant de l’artillerie de l’armée d’Italie. C’est en cette qualité qu’il fît le siège d’Oneglia (1794). Il proposa au général en chef Dugommier un plan pour l’invasion de l’Italie ; c’est ce plan dont le
- ↑ Peut-être : son affaire.