Page:Stendhal - Vie de Napoléon.djvu/343

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dans aucune, si l’on excepte la guerre d’Espagne, il ne fut l’agresseur. Il a été sur le point de faire du continent de l’Europe une vaste monarchie. Ce projet, s’il a existé, est sa seule excuse pour n’avoir pas révolutionné les États qu’il conquit et n’en avoir pas fait des appuis de la France pu les jetant dans la même route morale. La postérité dira que ce fut en repoussant les attaques de ses voisins qu’il étendit son empire. « Les circonstances, en me suscitant des guerres, dit-il, m’ont fourni des moyens d’agrandir mon empire et je ne les ai pas négligés. » Sa grandeur d’âme dans l’infortune et sa résignation ont été égalées par quelques-uns, surpassées par personne. M. Warden rend souvent témoignage à ces vertus, et nous pouvons ajouter qu’elles sont sans ostentation aucune. Sa manière d’être à Sainte-Hélène est pleine de naturel. C’est peut-être la chose dans les temps modernes qui rappelle le plus les héros de Plutarque. Un de ceux qui le visitèrent à l’île d’Elbe, lui montrant sa surprise du calme admirable avec lequel il supportait le changement de sa fortune : « C’est que tout le monde, répliqua-t-il, en a été, je crois, plus étonné que moi. Je n’ai pas une trop bonne opinion des hommes et je me suis toujours méfié de la fortune ; d’ailleurs, j’ai peu joui ; mes frères