Page:Stendhal - Vies de Haydn, de Mozart et de Métastase, 1928, éd. Martineau.djvu/115

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chants si baroques ont cependant leur agrément, et n’offensent point l’oreille.

On peut en juger, en quelque façon, à Paris, par la romance que Crivelli chante d’une manière si délicieuse dans la Nina de Paisiello. Ce maître s’est occupé à rassembler d’anciens airs qu’on croit grecs d’origine, et qui sont encore chantés aujourd’hui par les paysans demi-sauvages de l’extrémité de l’Italie ; et c’est d’un de ces airs arrangés qu’il a fait cette romance si simple et si belle.

Quoi de plus différent que le bolero espagnol et l’air Charmante Gabrielle de Henri IV ? Ajoutez-y un air écossais et une romance persane tels qu’on les chante à Constantinople, et vous verrez jusqu’où la variété peut aller en musique. Haydn se nourrissait de tout cela, et savait par cœur tous ces chants singuliers.

Comme Léonard de Vinci dessinait, sur un petit livret qu’il portait toujours sur lui, les physionomies singulières qu’il rencontrait, Haydn notait soigneusement tous les passages et toutes les idées qui lui passaient par la tête.

Quand il était heureux et gai, il courait à sa petite table, et écrivait des motifs de menuets et de chansons : se sentait-il tendre et porté à la tristesse, il notait des thèmes d’andante ou d’adagio. Lorsque