Page:Stendhal - Vies de Haydn, de Mozart et de Métastase, 1928, éd. Martineau.djvu/136

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essentielle dans des symphonies qui n’ont point de paroles pour les expliquer, et qui ne sont interrompues par aucun récitatif, par aucun moment de silence. Voyez l’adagio du quatuor n° 45 ; mais tous ses ouvrages fourmillent de tels exemples. Dès que son sujet commence à s’épuiser, il présente une agréable digression, et, sous des formes diverses et piquantes, le plaisir se reproduit. Il sait que, dans une symphonie comme dans un poëme, les épisodes doivent orner le sujet et non le faire oublier. Dans ce genre, Haydn est unique.

Voyez, dans les Quatre Saisons, le ballet des paysans, qui, peu à peu, devient une fugue pleine de feu, et forme une digression charmante.

La bonne économie des parties diverses d’une symphonie produit dans l’âme de l’auditeur une certaine satisfaction mêlée d’une douce tranquillité, sensation semblable, ce me semble, à celle que donne à l’œil l’harmonie des couleurs dans un tableau bien peint. Voyez le Saint Jérôme du Corrége[1] : le spectateur ne se rend point raison de ce qu’il éprouve, mais ses pas se tournent, sans qu’il s’en aperçoive, vers ce Saint Jérôme, tandis qu’il ne revient

  1. N° 897.