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musique en Europe, qui ignorât pendant longtemps la célébrité de Joseph Haydn. Le premier hommage qu’on lui rendit fut original. Comme si c’était un sort que tous les ridicules, en fait de musique, naquissent à Paris, Haydn reçut d’un amateur célèbre de ce pays-là la commission de composer un morceau de musique vocale. En même temps, pour lui servir de modèle, on joignait à la lettre des morceaux choisis de Lulli et de Rameau. On juge de l’effet que cette paperasse dut faire, en 1780, sur Haydn, nourri des chefs-d’œuvre de l’école d’Italie, qui depuis cinquante ans était au comble de sa gloire. Il renvoya les morceaux précieux, en répondant avec une simplicité malicieuse, « qu’il était Haydn, et non pas Lulli et Rameau ; que si l’on voulait de la musique de ces grands compositeurs, on en demandât à eux ou à leurs élèves ; que, quant à lui, il ne pouvait malheureusement faire que de la musique de Haydn. »

On parlait de lui depuis bien des années, quand, presque en même temps, il fut invité par les directeurs les plus renommés des théâtres de Naples, de Lisbonne, Venise, Londres, Milan, etc., à composer des opéras pour eux. Mais l’amour du repos, un attachement bien naturel pour son prince, et pour sa manière de vivre