Page:Stendhal - Vies de Haydn, de Mozart et de Métastase, 1928, éd. Martineau.djvu/363

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Don Juan n’a pas eu de succès à Rome ; peut-être l’orchestre n’a-t-il pas pu jouer cette musique très difficile ; mais je parierais qu’un jour elle plaira aux Romains.

La pièce de Cosi fan tutte était faite pour Cimarosa, et tout à fait contraire au talent de Mozart, qui ne pouvait badiner avec l’amour. Cette passion était toujours pour lui le bonheur ou le malheur de la vie. Il n’a rendu que la partie tendre des caractères, et nullement le rôle plaisant du vieux capitaine de vaisseau caustique. Il s’est sauvé quelquefois, à l’aide de sa sublime science en harmonie, comme à la fin, dans le trio

Tutte fan cosi.

Mozart, considéré sous le rapport philosophique, est encore plus étonnant que comme auteur d’ouvrages sublimes. Jamais le hasard n’a présenté plus à nu, pour ainsi dire, l’âme d’un homme de génie. Le corps était pour aussi peu que possible dans cette réunion étonnante qu’on appela Mozart, et que les Italiens nomment aujourd’hui quel mostro d’ingegno.