Page:Stendhal - Vies de Haydn, de Mozart et de Métastase, 1928, éd. Martineau.djvu/78

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tempête ! — La voilà ! la voilà ! » s’écrie l’arlequin en lui sautant au cou et l’étouffant. Haydn ajoutait qu’ayant passé, bien des années après, le détroit de Calais, et y ayant eu mauvais temps, il avait ri toute la traversée, en songeant à la tempête du Diable Boiteux.

« Mais comment, lui disais-je, avec des sons peindre une tempête ? et bien distinctement encore ! » Comme ce grand homme est l’indulgence même, j’ajoutais qu’en imitant les intonations particulières de l’homme effrayé ou au désespoir on peut, si l’on a du talent, donner au spectateur les sentiments que lui inspirerait la vue d’une tempête ; « mais, disais-je, la musique ne peut pas plus peindre distinctement une tempête que dire : M. Haydn demeure près de la barrière de Schœnbrunn. — Vous pourriez bien avoir raison, me répondait-il, songez néanmoins que les paroles, et les décorations surtout, guident l’imagination du spectateur. »

Haydn avait dix-neuf ans quand il fit cette tempête. Vous savez que le prodige de la musique, Mozart, écrivit son premier opéra à Milan à l’âge de treize ans, en concurrence avec Hasse, qui, après avoir entendu les répétitions, disait à tout le monde : « Cet enfant nous fera tous oublier. » Haydn n’eut pas le même suc-