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La jeune Mme Marini rappelle ces nymphes peintes sur les murs de Pompeia. Elle a des yeux étonnants et une folie plus étonnante : elle joue au hasard, s’en remettant apparemment à l’inspiration du moment. Dans le duo de la Norma, avant-hier, elle avait fait tant de folies comme actrice, qu’à la fin, elle ne pouvait plus que lancer les notes principales sans les lier aucunement, tant elle était essoufflée.

Il y a un petit ténor dans cette troupe italienne, qui chante comme on parle et va à l’ut dièze avec la voix de poitrine. Il est petit, chétif ; je trouvais qu’il prononçait bien le français d’une tyrolienne. Les gens de l’orchestre m’ont dit que le don Laborde est fils d’un perruquier de Montpellier ou de Nîmes. Il prend le bon parti ; il chante en italien. Mais il est bien chétif, bien maigre. Les femmes détruiront cette jolie voix.

Victorine ou le Songe[1], une mauvaise pièce, m’a touché jusqu’aux larmes. Les événements sont annoncés et non pas peints. Chaque entr’acte avance de dix ans dans la vie d’une fille entretenue et les traits de l’esprit manquent de délicatesse.

Je vais à Saint-Just malgré la pluie.

  1. Victorine ou la nuit porte conseil, drame de Dumersan, Gabriel et Dupeuty, 1831. N. D. L. E.