Page:Stendhal - Voyage dans le midi de la France, 1930.djvu/303

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rête un cheval, renouvelle l’amorce de ses pistolets, fait monter ce cheval du chemin derrière la haie, tue un ennemi, en blesse un autre, et, de ce fait, arrête une déroute qui, avant peu, pouvait être de la plus grande conséquence.

Le général lui dit : « Vous serez brigadier demain, maréchal des logis avant la fin de l’année. » Cet homme mérita, par sa conduite, d’être sous-lieutenant avant la fin de la campagne.

Comment, après une célébrité si magnifique, oserais-je dire que j’ai ennobli et, par le fait, désennuyé ma journée en montant sur le bateau à vapeur, à trois heures, au moment où personne ne pouvait se tenir sur le pont ? Le vent violent en venant, par rafales, me jetait la pluie au visage. Il me fallait constamment tenir mon chapeau d’une main. Cette baie de Toulon, grande comme un petit lac, était aussi agitée qu’elle pouvait l’être. Et cependant, pour tout dire, le bâtiment n’a pas dansé, mais il nous a fallu une heure pour gagner la jolie petite ville de La Seyne. J’ai été amusé par la galanterie d’un matelot transi (?) avec une fort jolie femme, ma foi, de la classe du peuple aisée, que la chaleur avait chassée de la chambre en bas, avec une de ses compagnes. Il l’a couverte d’une voile pour l’abriter un peu, elle et son